Cass. 2e civ. 13 juin 2019, n° 18-14.954 (P)


Vu l'article L. 132-8 du code des assurances dans sa rédaction applicable au litige ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que l'assuré peut modifier jusqu'à son décès le nom du bénéficiaire du contrat d'assurance sur la vie, dès lors que sa volonté est exprimée d'une manière certaine et non équivoque et que l'assureur en a eu connaissance ; qu'en l'absence de désignation d'un bénéficiaire dans la police ou à défaut d'acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre ; que cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu'avec l'accord de l'assuré, lorsque celui-ci n'est pas le contractant ; que cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d'avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l'article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire ;

Attendu que, pour condamner Mme TD à payer à M. QD la somme de 132 379,41 euros, l'arrêt retient que, par testament olographe en date du 10 août 1987, ce dernier a révoqué toute donation faite au profit de Mme TD, la privant de tout usufruit sur les biens de sa succession, et a institué son fils légataire universel ; que, le 7 août 1987, le défunt avait écrit à son notaire pour désigner son fils comme seul et unique héritier ; que l'arrêt retient encore que KD avait expressément indiqué, dans un écrit daté du 29 juillet 1987 et signé, que le capital-décès de son assurance-vie revenait à son fils ; que ce document, de façon autonome par rapport au testament olographe du 10 août 1987, comporte incontestablement une intention révocatoire de la clause bénéficiaire et a pour effet de détruire valablement l'attribution primitive du capital-décès à Mme TD, en lui substituant M. QD ; que ce document est cohérent, dans un contexte de séparation des époux D, avec les autres dispositions testamentaires du défunt qui visent à instituer son fils légataire de tous ses biens ; qu'en conservant les fonds malgré la connaissance qu'elle avait de la lettre du 29 juillet 1987, Mme TD a commis une faute en contrevenant aux dernières volontés du défunt ; qu'il résulte de cette faute un préjudice pour l'appelant équivalent au montant du capital-décès ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que l'écrit daté du 29 juillet 1987 avait été envoyé à l'assureur le 18 octobre 1991, soit postérieurement au décès de KD, ce dont il résultait que l'assureur n'en avait pas eu connaissance du vivant de l'assuré, et alors qu'elle n'a pas caractérisé que cet écrit constituait un testament olographe dont M. QD aurait été fondé à se prévaloir, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;

 

 

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